dimanche 10 janvier 2021

Conserver le fruit pendant l’élevage en maîtrisant le contact avec l’oxygène

 

Conserver le fruit pendant l’élevage en maîtrisant le contact avec l’oxygène


Les vins blancs, rosés et rouges à expression rapide ont besoin d’oxygène pendant la fermentation

alcoolique, parfois en début d’élevage pour contrer les aspects réducteurs liés aux lies. Ensuite, en

cours d’élevage et de préparation à la mise en bouteille, il faut limiter le contact avec l’oxygène, qui

provoque l’évolution du vin et la diminution des arômes fermentaires et fruités. Or, ces vins sont

souvent mis en bouteille tôt, pour conserver la fraîcheur du fruit. Du coup, on les travaille au plus

froid de l’hiver. Et c’est là que ça se complique… Maîtriser le contact du vin avec l’oxygène est donc

indispensable pour conserver le fruit des vins.

Ce qu’il faut savoir : oxygène et froid. Chacun sait qu’un vin froid est plus difficile à dégazer par

exemple. C’est une loi physique : les gaz sont plus solubles dans un vin froid. En chiffres : à 20°C, un

vin saturé en oxygène contient 8,4 mg/l d’oxygène dissous. A 0°C, il en contient 12 mg/l soit 30% de

plus. L’oxygène dissous dans le vin est ensuite consommé par des réactions d’oxydations (réaction de

l’oxygène avec le SO2 libre, avec les polyphénols…). Mais à froid, elles sont plus lentes.

Aérer à froid : la bombe à retardement. Un vin aéré à froid dissout de grandes quantités d’oxygène,

qui restent dans le vin et agissent plusieurs semaines après, quand le vin se réchauffe. A ce moment,

on assiste à une baisse du SO2 libre puis une oxydation rapide et importante du vin.

Gérer la réduction… avant les froids ! Exposer le vin au froid hivernal est positif pour sa clarification

et sa stabilisation tartrique. Par contre, avoir à ôter la réduction sur un vin froid (<10°C) est un

cauchemar oenologique. Les soutirages à l’air que l’on fera alors sont moins efficaces vis à vis des

composés soufrés que l’on a du mal à éliminer à froid, en revanche, les quantités d’oxygène

ingurgitées par le vin sont très importantes. Il faut donc faire de la prévention… quelques éléments :

un bon débourbage pour les blancs et rosés, à soigner d’autant plus que la vendange n’est pas tout à

fait assez mûre. Pas trop de SO2 sur la vendange (au pressoir ou à l’encuvage des rouges) : si la

vendange est saine, pas trop chaude et d’une acidité habituelle en Val de Loire, dépasser 3 g/hl est

inutile. Soutirer absolument les vins rouges avant malo. Et ne pas laisser blancs et rosés sur grosses

lies de fermentation si la vendange était un peu herbacée, ou si les premières odeurs de réduction

apparaissent. Les sulfitages massifs de sortie malo favorisent la réduction. Privilégier un sulfitage

fractionné.

Pour la gestion préventive de la réduction, le cliqueur est un outil intéressant. Il permet de fractionner des doses d’oxygène en fin de fermentation alcoolique sur des vins qui le nécessitent.

Soutirages et filtration à froid : réchauffer ou désoxygéner. En cours d’élevage, il faudrait pouvoir

attendre une remontée des températures des vins à 10-12°C minimum pour positionner les

soutirages et les filtrations. Quand on fait des mises précoces, que le chai n’est pas isolé, et qu’en

plus on dépend du planning d’un prestataire pour les filtrations, ça devient un vrai casse-tête. Ce qui

peut être fait dans ce cas-là, c’est de monter les vins en température quelques jours avant (ou un

inertage le plus complet possible du transfert cuve de réception saturée au CO2, inertage de la cuve

de départ en cours de pompage, pompage sous azote)

Suivi de l'oxygène dissous

Si une filtration a été faite sans précautions sur un vin froid (les températures basses diminuent la

filtrabilité et augmentent le colmatage) une solution « curative » existe encore… A la sortie de la

filtration, on fait une mesure d’oxygène dissous. En dessous de 1,5 mg/l, l’impact n’est encore pas

catastrophique.

Mais après une filtration à froid, on peut atteindre beaucoup plus ! (Exemple : un Chardonnay 2014

analysé à 6,5 mg/l d’oxygène dissous… soit de quoi consommer 30 mg/l de SO2 libre !)

Augmenter les doses de SO2 en tenant compte de la dose d’oxygène n’est certes pas la bonne

solution !

Chiffres à retenir :

Saturation en oxygène d’un vin : 8 mg/l à 20°C

Cliquage : apport de 2 mg/l

1 mg/l d’O2 dissous consomme entre 3 et 5 mg/l de SO2 libre.

Conclusion

L'œnologie moderne consiste à utiliser au mieux les gaz. Azote, oxygène, CO2 trouvent leur place

dans l'élaboration d'un vin élégant, aromatique et délicat. L’art de bien manier le sulfitage contribue

à révéler le fruit, alors qu’une gestion trop systématique peut contribuer à standardiser le vin. Et bien

manier le sulfitage passe aussi par maîtriser le contact du vin avec l’air. Il ne s'agit pas de faire des

vins à défauts mais le consommateur doit croquer le raisin quand il déguste un vin. Le temps des vins réduits, des infusions de SO2 est révolu.

NB : Pour le dosage de l’O2 dissous, contacter votre laboratoire d’analyses œnologiques

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

BIENVENUE SUR " Faire des Vins adaptés aux Marchés"

Le Pinking : Un Phénomène qui Ternit la Beauté des Vins Blancs

  Qu'est-ce que le Pinking ? Le pinking , ou rosissement oxydatif , est un phénomène qui affecte la couleur des vins blancs, leur do...